EN COURS DE RELECTURE
Les définitions données précédemment concernant la résolution temporelle des paiements sont compatibles avec les spécifications de valeurs actuelles données dans les spécifications actuarielles , à condition d'assimiler un "vecteur pilote" à la projection d'une fonction de paiement sur un état
; la dépendance à l'état observé de la police devient alors explicite.
La spécification actuarielle des valeurs actuelles peut donc être reformulée dans le langage des fonctions de paiement sur l'espace ; c'est l'objet du formulaire ci-dessous.
Il faut garder à l'esprit que ces formules reposent sur l'hypothèse que le taux d'escompte et les probabilités de transition entre états différents sont faibles (interpolation linéaire des probabilités de transition annuelles et développement au 1er ordre). Le formulaire a donc une validité générale dans la mesure où cette hypothèse est respectée.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, précisons comment sont déterminés les facteurs d'escompte (ingrédients essentiels dans le calcul de la valeur actuelle).
Considérons un taux d'escompte variable dans le temps ; plus précisément, le taux d'intérêt déterminant pour la valeur actuelle est un taux annuel dépendant de l'année. Soit donc le facteur d'escompte, défini de telle manière que la valeur actuelle au temps
d'un capital 1 versé au temps
vaut
étant le taux d'intérêt annuel applicable au cours de la période
(soit dans l'intervalle de temps
).
On peut donc écrire la valeur actuelle au temps d'un capital 1 versé au temps
(
) :
On notera la propriété multiplicative
Dans la plupart des cas, la fonction d'escompte définie sur des temps entiers est suffisante : les formules d'interpolation de la valeur actuelle, qui seront définies plus loin, permettent précisément de se ramener à des temps entiers.
Il existe toutefois deux situations qui demandent la définition d'une fonction d'escompte étendue aux temps continus :
On peut interpréter une telle fonction étendue comme la "valeur escomptée" au temps réel d'un capital 1 versé au temps réel
, mais il faut garder à l'esprit le point suivant :
On imposera les contraintes suivantes sur une fonction d'escompte étendue
A noter que la propriété multiplicative cesse d'être vraie en général.
Sur cette base plusieurs extensions de la fonction d'escompte peuvent être construits. Nous définirons pour l'instant une seule extension, qui sera utilisée pour le calcul de l'invalidité.
La manière la plus simple de construire une extension de la fonction est de poser
On voit immédiatement qu'une telle extension possède la propriété multiplicative générale
(on vérifiera plus loin que la réciproque est vraie). On obtient une extension standard de en choisissant
Autrement dit, on procède à un calcul "d'intérêts composés" en temps continu : si le taux d'intérêt est constant, on a simplement
Dans le moteur de calcul cette extension est implémentée par les classes
|
La valeur actuelle d'une (somme de) fonction(s) de paiement, que nous noterons , est d'abord définie comme une grandeur observée dans le temps continu : elle représente l'espérance mathématique des paiements futurs escomptés, mesurée au temps
, alors que la police se trouve dans l'état
. En particulier, le principe d'équivalence stipule que
pour la somme des fonctions de paiement.
Pour diverses raisons Ceci permet de voir la valeur actuelle comme un opérateur agissant sur l'espace des fonctions de paiement. Exemples d'utilisation: frais d'acquisition définis en fonction de la valeur actuelle des primes, restitution d'un pourcentage de la valeur actuelle d'une rente viagère en cas de décès, etc. , il est souhaitable de définir également la valeur actuelle en tant que fonction de paiement, autrement dit comme une fonction réelle . Par définition, on pose
Autrement dit, est la valeur actuelle mesurée au début de la période
. On vérifie que
est bien définie sur
.
Revenons maintenant à la valeur actuelle observée dans le temps continu. Nous commencerons par calculer sa valeur aux temps entiers, puis nous présenterons des formules d'interpolation pour les temps non entiers.
Soit l'état de la police observé au temps initial
. La valeur actuelle
d'une fonction de paiement
satisfait la relation de récurrence (conformément aux spécifications actuarielles) :
où
Nous nous restreindrons ici au seul cas connu actuellement, qui est celui de la rente d'invalidité. Concrètement, cela signifie que nous faisons les hypothèses restrictives suivantes :
Ces restrictions sont principalement dues au fait que nous ne disposons pas d'une mesure de probabilité complète sur l'espace semi-Markovien; les probabilités introduites ci-dessous doivent être comprises comme effectives, et non pas comme de réelles probabilités de transition entre états semi-Markoviens. Le cas échéant, le formalisme utilisé se prêtera à une éventuelle généralisation.
Afin de simplifier les notations, introduisons deux opérateurs sur l'espace des états .
L'opérateur de translation temporelle (pas de transition vers un nouvel état instantané) est défini comme :
L'opérateur de transition de l'état instantané (actif) vers l'état instantané
(invalide) avec délai d'attente
(
) est défini comme :
(cette définition ne s'applique qu'aux états "actifs", mais elle suffit à nos besoins).
Considérons une police qui se trouve au temps dans l'état initial
, et une fonction de paiement
restreinte aux états invalides.
Définissons deux fonctions ,
, qui sont les valeurs actuelles restreintes aux états de type
,
respectivement (actif / invalidité en cours). On dispose des relations de récurrence suivante Conformément aux spécifications actuarielles (OK pour le cas anticipé, mais à terme échu ou immédiat?):
où
La récurrence peut être résolue d'abord pour , ensuite pour
On obtient finalement
:
avec :
Les coefficients ne peuvent être interprétés comme de réelles probabilités de transition dans l'espace semi-Markovien : la formule somme toutes les "trajectoires" dans l'espace des états aboutissant à un état invalide, et les remplace par une unique trajectoire actif->invalide dans laquelle la probabilité de rester actif est remplacée par la probabilité de rester vivant Un vrai calcul probabiliste consisterait à considérer toutes les trajectoires actif->IV->actif..->IV, et les probabilités de transition correspondantes.. En d'autres termes, les coefficients
sont définis comme suit :
Il s'agit à nouveau d'une formule obtenue par interpolation linéaire et développement au 1er ordre dans les probabilités de transition et le taux d'escompte. On notera en particulier que les termes en n=0 sont asymétriques : les paiements sont proportionnels à
, ce qui traduit le fait que la rente versée dans l'année qui suit l'expiration du délai d'attente ne l'est que pendant une durée
. On notera également que le cas
nous ramène à une expression conforme au modèle abstrait à temps discret.
Lorsque n'est pas entier, ou lors d'une mutation en cours d'année, il est nécessaire de calculer la valeur actuelle à des temps non entiers. Ceci est fait par interpolation, en fonction du mode de résolution temporelle de la fonction de paiement.
Dans le cas Markovien, la formule d'interpolation s'écrit ( ) :
où le facteur de report est défini par
et pour
Il importe de souligner que cette dernière formule n'est applicable que pour (à cause du terme de report, la valeur actuelle peut présenter des discontinuités aux temps entiers).
La dérivation de cette formule est esquissée en annexe; il faut souligner qu'elle n'est correcte qu'à l'ordre zéro dans la période initiale (i.e. la période ).
Lorsque n'est pas entier (date d'échéance hors anniversaire), il est également nécessaire de corriger la formule de la valeur actuelle. Puisque l'intervalle du temps peut être réduit à une seule période (si
, ou en cas de mutation au cours de la dernière année), il est naturel d'envisager ce cas comme une extension de la formule d'interpolation pour
non entier. Cette dernière étant correcte à l'ordre zéro uniquement, on peut garder le même niveau d'approximation et poser (
,
):
où le facteur de report est défini par
et pour
Comme précédemment, le facteur de report annule (à l'ordre zéro) la valeur actuelle interpolée, et la remplace par la somme des termes versés dans l'intervalle
(autrement dit,
compte le nombre de termes versés dans la période).
Il importe de remarquer que la formule d'interpolation par rapport au temps initial prend la forme suivante :
où est l'état initial et
est l'opérateur de translation temporelle, de sorte que
. Ici le terme de report peut être ignoré car on considère uniquement des fonctions de paiement dues dans l'état invalide.
Jusqu'ici nous n'avons considéré qu'une seule extension de la fonction d'escompte aux temps réels :
(extension standard : intérêts composés continus).
Mais d'autres extensions existent, qui ont chacune leur utilité.
On dira qu'une extension possède la propriété multiplicative générale si elle satisfait :
Une extension de la fonction d'escompte jouit de la propriété multiplicative générale si et seulement si elle peut s'écrire sous la forme |
Il est facile de voir que l'expression proposée jouit de la propriété multiplicative générale. Démontrons que la réciproque est vraie. Si on découpe l'intervalle Prenons le logarithme : Si l'on admet que la fonction d'escompte est dérivable, on peut écrire et ainsi dans la limite où k tend vers l'infini |
L'extension standard ne correspond pas au calcul d'intérêts usuel (intérêts composés annuels).
Si les intérêts sont composés annuellement (comme dans un compte bancaire), la valeur escomptée en d'un capital unitaire versé au temps
est donnée par
Les autres valeurs sont données par la propriété multiplicative restreinte
Il faut souligner que si ne jouit pas de la propriété multiplicative générale, cette dernière est cependant vraie au premier ordre en i (taux d'intérêt annuel). Ce fait sera utilisé lorsque nous discuterons des paiements finaux.
Lorsqu'un calcul d'intérêts est communiqué au client (voir exemple plus loin), il est d'usage d'utiliser la fonction (qui correspond au calcul que le client pourrait faire lui-même).
Dans le moteur de calcul cette extension est implémentée par la classe
|
Si l'espace des états est scalaire (espace trivial, avec un seul état), la valeur actuelle ne fait intervenir aucune probabilité : elle est donc essentiellement une valeur escomptée. Il est dès lors assez naturel de considérer la valeur actuelle comme définissant elle-même une fonction d'escompte , autrement dit
dénote ici la valeur actuelle au temps s, sur notre espace scalaire, et
un paiement unitaire au temps t. A ce stade nous ne faisons aucune hypothèse particulière sur la manière dont
est calculée; nous disons simplement que la valeur actuelle sur un espace scalaire peut être vue comme une fonction d'escompte, et vice-versa.
Comme nous venons de le voir, dans le cas d'un espace scalaire la valeur actuelle peut être assimilée à une fonction d'escompte. On peut donc se demander si le principe d'équivalence conduit aux mêmes résultats qu'un calcul d'intérêts. Plus précisément, si on considère deux paiements unitaires , on voudrait que ces deux paiements soient actuariellement équivalents si et seulement si
pour une certaine fonction d'escompte
.
On dira donc que la valeur actuelle (ou la fonction d'escompte
associée) possède la propriété de capitalisation générale
si l'équation
a toujours pour solution
.
Si la valeur actuelle
|
La propriété de capitalisation générale On peut le réécrire En prenant u=s, on obtient |
Il n'existe aucune formule de valeur actuelle sur un espace scalaire ayant la propriété de capitalisation générale |
Le corollaire découle directement du fait que |
Le résultat qui précède est un peu ennuyeux, comme le montre l'exemple pratique suivant. Considérons une prestation B finale (i.e. payée au temps final ) obtenue comme contrepartie d'une prime
(
est par exemple une substance entrante à l'effet u de la mutation); autrement dit B est obtenue par un principe d'équivalence :
Imaginons maintenant que le montant B est communiqué au client, et que ce dernier soit en mesure d'effectuer le calcul d'intérêts correspondant : il s'attend bien sûr à trouver
Nous venons de voir qu'aucune définition de ne permet d'obtenir ce résultat dans tous les cas (i.e. pour n'importe quelle prestation). Mais on peut se contenter d'une propriété de capitalisation restreinte au cas d'un paiement final.
On dira que la valeur actuelle (ou la fonction d'escompte
associée) possède la propriété de capitalisation finale
si l'équation
a toujours pour solution
.
On notera que cette définition ne dit rien sur les valeurs de la fonction au-delà du temps final .
Afin de résoudre le problème du paiement final ci-dessus, il nous reste donc à construire une valeur actuelle (ou une fonction d'escompte) avec la propriété de capitalisation finale . Notons
une telle fonction d'escompte. La propriété de capitalisation finale implique
Pour des raisons pratiques, il est nécessaire d'étendre cette définition au-delà du temps final , c'est-à-dire au domaine
Il est raisonnable d'exiger
(on vérifie sans peine que les deux dernières conditions sont déjà satisfaites sur le domaine ). L'extension recherchée est donnée par la formule :
La propriété multiplicative montre qu'il suffit de définir En généralisant cette expression à
|
Dans le moteur de calcul l'extension On notera que la valeur actuelle |
A ce stade, on peut se demander quelles sont les propriétés de la valeur actuelle définie par
(autrement dit : calcul exact avec la fonction d'escompte "bancaire" , correspondant à des intérêts composés annuels). On vérifie que
possède la propriété de capitalisation initiale
, définie comme suit :
La valeur actuelle (ou la fonction d'escompte
associée) possède la propriété de capitalisation initiale
si
, l'équation
a toujours pour solution
.